Tour des monts d’Aubrac J5 : de Rieutort à Aubrac

J5 de notre randonnée Liberté du Tour des monts d’Aubrac, de Rieutort d’Aubrac à Aubrac1. Le hameau d’Aubrac se situe au carrefour de trois départements (Aveyron, Cantal, Lozère) et de trois régions (Midi-Pyrénées, Auvergne et Languedoc-Roussillon). Aubrac peut être considéré comme le cœur du plateau du même nom.

Le chauffeur de taxi nous dépose à Rieutort d’Aubrac près d’un ancien abreuvoir. Le ciel est contrasté, plutôt dans les tons pluvieux mais ça donne aux paysages un côté irréel. La première croix de granit rencontrée porte sur son piédestal et sur ses branches, la trace du passage de nombreux pèlerins qui ont déposé un modeste caillou supposé provenir du lieu où ils habitent. Cette tradition persiste le long de nombreux chemins de pèlerinage dans le monde, comme à la Cruz de Ferro, en Camargue, où même en des lieux symboliques comme au cairn 2000 sur la montagne de Lure. Nous n’avons pas amené de cailloux… mais en avons déposé un prélevé sur place.

La tradition, […] veut que chaque pèlerin dépose au pied de la croix une pierre ou un caillou transporté depuis le lieu de départ. Ce poids supplémentaire et inutile dans le sac à dos représente les choses superficielles auxquelles nous accordons souvent une trop grande importance dans la vie… Le pèlerin, arrivé au point culminant du Camino, peut se libérer de ce qui lui pèse, avant d’entamer la dernière partie de son parcours vers le tombeau de l’apôtre. Selon Le Camino francés culmine à la Cruz de Ferro

En face du pré où un taureau est en train de paître, s’étale Bouquincan ! un drôle de nom pour cet ancien moulin, nom que l’on retrouve dans plusieurs livres anciens écrits en français (mémoires sur l’ancienne chevalerie, Jean-Baptiste de La Curne De Sainte-Palaye ou La surprise du sieur de Soubise ; de Bouquincan general de l’armée Angloise, avec la deffaite de leur suitte, 1627) et qui désigne le duc de Buckingham. Dans plusieurs dictionnaires français-provençal du XVIIIè, ce terme désigne aussi un ‘bonnet à forme haute’ dont les bords se rabattent pour se protéger du mauvais temps. L’origine est-elle donc historique ou par analogie avec la forme d’une hauteur environnante ? A en croire le site de la commune de Marchastel, leur château fut assiégé et pris par les Anglais sous le règne de Charles V (pendant la guerre de Cent Ans). Les Anglais, qui avaient campé dans la plaine le long du Bès, y auraient édifié un moulin dont le nom francisé n’est autre que celui du duc de Buckingham.

Le territoire de Marchastel même n’est qu’une vaste étendue de pâturages verts ; au coeur de cette prairie humide, la végétation reste verte tout l’été. L’Aubrac possède un chevelu dense de cours d’eau : un « château d’eau » naturel.

Le lit majeur du Bès est très étendu et très peu encaissé. Il s’étend dans les tourbières séparées de quelques buttes arrondies ; une vallée se forme et des terrasses non inondables apparaissent de chaque côté du lit.

Une première vache traverse la rivière facilement, à l’endroit le moins profond ; après un long moment d’hésitation, une vache puis deux puis le troupeau suivent la première en beuglant : elles ont de l’eau au dessus du genou, elles s’inquiètent. Pas si bête la première qui a donné le signal aux autres.

Après le Puech del Pont (voir le panoramique de Hervé Sentucq), plusieurs pancartes non équivoques interpellent le pèlerin en quête d’hébergement ou de nourriture ; après Carouquet Haut et son buron, nous arrivons au pont sur le Bès, une des principales rivières de l’Aubrac.

A Mongros, les informations se juxtaposent en hauteur : le GR, le sentier jaune, la coquille des pèlerins de Compostelle, le circuit du Déroc et une flèche rouge.
Vidéo de la cascade vue d’un drône, par Christian Segonne.

Après la publicité pour un taxi et pour un restaurant fiché dans un poteau de bois, nous arrivons à Nasbinals. Les maisons et  les commerces se groupent autour de l’imposante église Sainte-Marie, un des fleurons de l’art roman en Aubrac. Elle fut construite dès le XIè siècle par les moines de Saint-Victor de Marseille comme centre d’un prieuré dépendant d’Aubrac accueillant les pèlerins avant une étape particulièrement difficile par mauvais temps. Elle est remarquable par la polychromie de ses matériaux, son clocher octogonal et la voûte de la nef en ogive.

Créé en 2003 par une association locale, le festival Phot’Aubrac est un festival photo dédié aux amateurs de photographies.  Sur un mur de Nasbinals, je tombe sur une photo géante du photographe naturaliste Renaud Dengreville.  Assistant réalisateur sur le film microcosmos, il parcourt le plateau à la recherche des images qui illustreront son prochain ouvrage ou son prochain film. Chenille de cucullie ?

Après une pause, nous repartons sur le GR 65, passant à côté de la stèle d’un marcheur de 58 ans décédé en chemin en 2011. Après le champ de gentianes desséchées, les murets de pierre sèche, nous entrons dans un sous-bois humide.
Un rapace vole très haut dans le ciel : avec sa queue en triangle concave, serait-ce un milan royal ?

Plutôt charognard, il préfère consommer des animaux morts que de leur faire la chasse. Il est assez commun en Lozère. Les zones humides d’Aubrac étant des milieux ouverts par excellence, elles l’attirent. Les populations semblent stables et même en augmentation dans le sud du pays : Massif Central, Piémont pyrénéen et Corse. La plupart des milans royaux d’Europe de l’Ouest passent la saison froide en Espagne où il a été recensé jusqu’à 60000 hivernants. Un petit nombre d’entre eux volent jusqu’en Afrique du Nord.

Commence alors une longue ligne droite que nous parcourons tout en discutant. Soudain, nous nous trouvons à la ferme de Pascalet ; les propriétaires, juchés sur leur tracteur, font de grands gestes de dénégation pour signaler notre erreur. Il faut prendre la barrière un peu avant mais nous n’avons pas vu le balisage. Demi-tour. Une centaine de mètres plus loin, un message affiché à la barrière, nous invite à laisser notre obole en faveur des propriétaires qui entretiennent et aménagent le sentier. Ensuite, le pâturâge à perte de vue, sur des kilomètres et juste quelques traditionnels burons comme à Ginestouse bas, complètement perdus dans la verdure. A la barrière de sortie, nous retrouvons un morceau de hêtraie préservée de la déforestation. André et moi y déjeunons, observant les pèlerins pressés fiers de marcher 30km par jour : et nous,  nous prenons tout notre temps.

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Au fil de l’eau la Valserine, à pied, à vélo, en voiture

Invitée par Ain tourisme pour le lancement de testAin rando, j’ai recherché ce qui caractérisait le département de l’Ain  si peu connu de mon entourage. Je résumerai :

  • Traversé par la chaîne du haut Jura, ce département compte les plus hauts sommets du Jura : le Crêt de la Neige (1720m), le Reculet (1719 on a failli y aller). Voir dans ce blog l’article Vers le sommet du Reculet et le balcon du Léman
  • Un tram de campagne entre Bellegarde et le village de Chézery
  • Plusieurs fromages au goût unique : le bleu de Gex, la tome de l’Ain et le comté ; une spécialité que je n’avais jamais goûtée : les saucisses au bleu !
  • 7 sites classés, 11 MH monuments historiques inscrits ou classés dont 2 à Chézery Forens dont on ne nous parlera pas (la statue de la Vierge à l’enfant en bois polychrome, la borne frontière entre la Franche-Comté et le Bugey datée de 1613)
  • Aucune industrie polluante n’est située sur le territoire du pays de Gex Evaluation environnementale de la communauté de communes du pays de Gex
  • le CERN, centre de recherche ayant découvert récemment des particules dépassant la vitesse de la lumière.
  • une zone franche : l’instauration d’une zone franche à Bellegarde, particularité politique économique et douanière, fit suite aux découpages territoriaux du Traité de Paris (1815). Pour maintenir les relations séculaires entre Genève et le Pays de Gex, que la ville considérait comme son arrière-pays nourricier, le statut de zone franche donnait la possibilité d’importer en Suisse certains produits en franchise de droits de douane.
  • des sports d’été et d’hiver, certainement à un prix plus raisonnable que dans les Alpes
  • une nature bien verte… ce que dit du massif jurassien le cahier des charges du fromage de Comté :

    L’ensemble de la zone se caractérise par un climat de type continental, avec de grandes amplitudes thermiques entre l’hiver et l’été, et des précipitations qui, bien que réparties sur toute l’année, sont importantes en été. […] C’est un milieu montagnard ou sub-montagnard très arrosé avec une pluviométrie annuelle toujours supérieure à 900 mm et généralement supérieure  à 1000 mm. [Aix-en-Provence : 554mm, soit la moitié]

La météo à cet endroit
avec prévisions à 3 jours

C’est vrai que la pluie n’est pas un argument favorable au tourisme mais il faut bien en tenir compte, soit en inventant des loisirs d’intérieur (espaces de jeux couverts, musées, expositions, dégustations, activités créatives autour de l’artisanat local, etc), soit en inventant des activités autour de la pluie (!), soit en proposant des balades courtes et ludiques à l’extérieur (être mouillé un peu, ça passe, être mouillé  trop, ça ne met pas de bonne humeur…) en portant un bel et long imperméable aux couleurs de « l’Ain, mon luxe au naturel »…

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Minerve, classé plus beau village de France

img_7757r.JPGimg_7795r.JPGMinerve, un des plus beaux villages de France, je suis prête à le croire. C’est le deuxième week-end consécutif que je passe dans cette région, tant elle m’a plu. Le dépaysement sans doute : la fraicheur du canal du midi, l’histoire, les paysages auxquels je ne suis pas habituée et qui donnent l’impression d’être au bout du monde, l’accueil. Dès que nous arrivons près du village, nous arrêtons la voiture, appareil photo en main. On regarde les gorges impressionnantes malgré un maigre filet d’eau, et le vieux village bâti sur l’un de ses flancs, profitant du rocher pour s’y adosser. Des remparts et la porte basse la protègent encore. La candela, seul vestige octogonal du château du XIIIème siècle, semble fièrement se dresser au-dessus de toutes les maisons. Comment cette forteresse imprenable a-t-elle pu succomber aux mains de Simon de Montfort en 1210 ?
Histoire de Minerve, Les Cahiers de Minerve n. 01, Préface de Pierre Bauduffe, Inspecteur de l’Education Nationale de Béziers III, 1998
En parcourant le village et ses ruelles étroites, nous découvrons une première cave : le sommelier à l’accent roulant du sud-ouest, prépare une « verticale » pour 18h (le même vin vieilli sur 10 ans et dégusté en partant du plus jeune au plus vieux) ; il nous parle avec passion de son vin. Il nous invite à une première dégustation. Première parce qu’il y en aura d’autres : boire peu mais bon, telle est ma devise.

La météo aujourd’hui à cet endroit :
Avec la température ressentie

Un pont viaduc très long traverse la rivière asséchée de la Cesse, et sous celui-ci quelques jardins où vagabondent librement un coq et sa basse-cour. De là, le premier pont naturel se dévoile : le pont Grand 228m et le pont Petit 126m creusés par l’érosion de deux rivieres réunies : la Cesse et le Brian, depuis le début du quaternaire. En ce jour de mai, il est possible de passer dessous presque en totalité. A certaines périodes de crue, c’est impossible. Petite sensation d’oppression sous le tunnel sombre quand je pense qu’au-dessus de nos têtes passent des centaines de voitures. Certes la voûte mesure plus de 25m de hauteur… Nous entendons le clapotis de l’eau sans comprendre d’où il peut venir. Le lieu de convergence de ces rivières est étrangement calme.

img_7770r.JPGimg_7776r.JPGimg_7772r.JPGimg_7783r.JPGimg_7785r.JPG

Schéma géologique (coupe) de Minerve
Histoire de Minerve blog cessenon
Histoire de Minerve par l’office du tourisme

img_7763r.JPG« Le monument als catars 1210 a été taillé dans la pierre de Minerve par J.L. Séverac en 1981. Il est dédié à la mémoire des cathares. 140 à 180 moururent dans les flammes du bûcher [ndlr : où ils s’y jettèrent, parait-il]. Le monument est un bloc de pierre du causse finement taillée par le sculpteur dans sa partie haute où la colombe cathare (en bas sur la photo à contre-jour) apparaît dans toute sa splendeur. »

Les Cathares (nom d’origine grecque signifiant «pureté») contestent à l’Église catholique Romaine d’être la seule à détenir la Vérité religieuse, et veulent une église plus «pure» tout en restant chrétiens. Cette doctrine va se répandre grâce aux Parfaits, hommes ou femmes ayant reçu le «consolamentum».  Ils parcourent le pays, mènent une vie chaste et austère, pour porter le message cathare. Les seigneurs les accueillent dans leurs châteaux et leur offrent leur protection. Le mouvement … inquiète Rome et le Pape Innocent III ainsi que le roi de France, Philippe Auguste. Ce sera la croisade Albigeoise, sous la conduite de Simon de Montfort qui durant un demi-siècle va pourchasser dans tout le Laguedoc «l’hérésie» Cathare.  » Extrait d’un site canadien

Le Hérault des terres cathares

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