* Brangoli et Santa Maria de Bell-Lloc

Immersion dans la Catalogne avec ce parcours passant par le hameau de Brangoli et Mare de Deu de Bell-Lloc (en catalan), bellus loco (en latin), Belloc (en français), ce qui veut dire beau lieu. Après la balade archéologique d’Eyne, j’ai dégusté de bon appétit la tarte aux légumes  qu’Anne, du gite testsan Feliu, m’a cuisinée hier soir. Adepte de la cuisine végétarienne, avec mon accord elle m’a proposé au dîner d’hier, une soupe, un gratin de fenouil, du vin de pays, un dessert et une tisane. Discussions riches, quelquefois plus personnelles mais toujours respectueuses de l’autre.

la météo du jour à Dorres
Avec le vent à 3 jours

Pharmacie musée de LLiviaPour me rendre sur le lieu de ma randonnée, je traverse Llivia, tente de monter jusqu’à la place que m’a indiquée Anne et me trouve bientôt coincée dans un flot ininterrompu de voitures, invectivée en espagnol. Cette enclave espagnole dans les Pyrénées orientales, de la province de Gérone ne porte aucune mention en français. Manifestement, pour cette période de Pâques, les espagnols sont venus en force.

Le 7 novembre 1659, par le traité des Pyrénées, Luis de Haro et le Cardinal Mazarin décident de la division. […]. Llivia est le bijou convoité par les deux couronnes française et espagnole.
Le 22 novembre 1660, le traité de Llivia est signé, laissant Llívia à l’Espagne mais il y a encore de la contestation.
Le 26 mai 1866, […] les Français et les Espagnols signent le traité de Bayonne, dont l’article 16 établit définitivement le périmètre de l’enclave. Miguel de Salba joue sur les mots : le traité [des Pyrénées] parle de villages et non de villes, or Llívia a été faite ville royale en 1528 par Charles Quint : elle ne fait pas partie du partage et reste à l’Espagne. Dès lors une « route neutre » (sans contrôle douanier) de 4 km relie Llívia au territoire espagnol et à la ville de Puigcerdà.

Maisons à FanèsPar une route sinueuse et étroite, je traverse le hameau de Fanès et ses maisons de pierre, je me gare un peu avant Brangoli, le long de la route, près du panneau fléchant le dolmen ; un cheval échappé de son enclos, me barre l’accès à celui-ci. Je le visiterai au retour.

Le BrangoliJe passe au dessus du pont sur le Brangoli en suivant le GR. Dès que j’aperçois la chapelle, j’y monte par un sentier sur rochers sablonneux empruntant donc le GR dans le sens inverse.

Un petit conseil : pour ne pas trop chercher ensuite le sentier qui monte jusqu’au col, mieux vaut suivre la route jusqu’au métier à ferrer les chevaux, passer devant le château, entrer dans le village par la gauche, visiter la chapelle et le cimetière puis continuer le GR sur la droite qui a donc fait une boucle presque complète.

La chapelle Saint-FructueuxLa chapelle Saint-Fructueux bâtie récemment à l’endroit d’une chapelle mentionnée au XIIIe, contient un retable du maître-autel du XVIIIe, un autre de la Vierge (1850), une toile du XVIIe siècle, ainsi qu’une croix processionnelle du XVIIIe. Selon wikipedia. Elle est bien grande car autrefois ce hameau de la commune d’Enveigt était habité. Fermée, elle ne se laisse découvrir que de l’extérieur. Si j’avais pu y entrer, j’aurais vu, selon Anne, des étoiles dorées sur fond bleu représentant la voûte céleste au mois d’août.

L'entrée du cimetièrele cimetière de BrangoliPour accéder au cimetière pentu, en face de l’église (gravé 1850 sur le pilier de la porte), il faut courber l’échine pour y entrer puis descendre quelques marches.

Un symbole d’humilité ?

Château de BrangoliLe domaine du château de Brangoli, grande propriété rurale devenue gite, s’ouvre sur un portail au linteau gravé des armoiries des propriétaires. Daté du XVIIIe (sur le portail n’est-il pas écrit 1871 ?), son emplacement actuel fut jadis occupé par une propriété rurale romaine.

Travail à ferrerLe travail à ferrer les chevaux a quelques similitudes avec le métier à ferrer les bœufs que j’avais vu en Aubrac lors de ma 3ème journée. Quelques ferrures pour y passer des cordes, sont encore accrochées aux piliers de granit, pierre probablement trouvée sur  place : la corde de garrot empêche que le cheval ne se cabre. Le pied est levé, porté par un « repose pied » amovible et maintenu par les courroies de cuir. Article sur le ferrage dans un travail, par les haras nationaux

Des rochers en équilibreBlocs de rochers fendusLa montée vers le col de Juell (1633m) est progressive et agréable, parfois sur des zones sableuses, mais toujours avec des rochers érodés épars. En se dégradant, le granite et les schistes se désagrègent en une arène sableuse. Du coup les arbres ont du mal à s’y accrocher, la zone forestière  n’est donc pas très dense. Les fondements des paysages des Pyrénées orientales

Un écureuil s’immobile sur la branche haute d’un arbre. J’en fais autant (mais pas sur une branche bien sûr). Je m’approche en douceur mais il m’a entendu et détale. Dommage, pas de photo.

Fleurs jaunesChapelle notre Dame de Belloch sur sa collineLe sentier GR de pays Tour du Carlit est bien balisé ; peu de fleurs encore. Au col de Juell (1633m), je prends l’option par la conduite (GR de pays Tour de Cerdagne) sur un sentier dominant qui offre déjà une vue superbe sur les Pyrénées françaises. Plus je m’avance, plus se découvrent ensuite les Pyrénées espagnoles. Le plus large et le plus beau point de vue de la Cerdagne.

Panoramique Pyrénées espagnoles

Continuer la lecture de « * Brangoli et Santa Maria de Bell-Lloc »

* Balade archéologique d’Eyne

La Catalogne, d’emblée, m’a fait douter que j’étais en France : tout le monde parle catalan, petits et grands, et lors de la visite de fort Libéria à Villefranche-de-Conflent, j’étais la seule qui ne comprenait rien aux échanges. A l’arrivée, le chauffeur de la navette du fort a quand même pensé à m’adresser quelques mots en français. Cette forte identité qui se dégage de la région s’explique par son histoire.

la météo du jour à Eyne
Avec le vent à 3 jours

Je vous conseille de descendre du fort Vauban par le souterrain aux mille marches (734 en vérité) construit plus tard, entre 1850 et 1853 : sensations garanties !

Chambre 3Gite San FeliuArrivée à LLo – prononcez Yo, nous sommes en Cerdagne – un peu après 18h au testgite San Feliu, j’ai été accueillie par Anne qui s’était déjà inquiétée de ne pas me voir arriver. Elle me présente ma chambre, coquette et simple ; sur la mezzanine, toilettes et douche à l’italienne ; un petit balcon donne sur les montagnes. Et le wifi pour ceux qui ne savent plus se passer d’internet ! Que demander de plus ? Elle m’accueille avec un verre de jus de pommes et nous échangeons sur les randonnées : pour la mise en forme, la première sera facile et comblera ma curiosité : la balade archéologique d’Eyne rassemble sur peu de distance, plusieurs vestiges préhistoriques et antiques.

[…] le territoire de la commune [d’Eyne] a été habité très tôt par les premiers hommes préhistoriques. Nous sommes au néolithique, vers -6000. Les premières traces évidentes se trouvent à travers les dolmens et les menhirs, de l’époque mégalithique (-2200). Une civilisation plus moderne du Ve siècle avant JC, les Keretanis […] occupaient la Cerdagne, ainsi qu’une partie des hautes terres de l’actuelle Andorre et Espagne.

 

Dolmen el PouDolmen el PouDépart du parking en terre battue en face du club équestre. La carrer del Carreter se termine en chemin de terre.Vue sur le massif du Carlit Balisage jaune-rouge. Après le passage du ruisseau qui s’écoule par palier, c’est le dolmen el Pou caché autrefois sous un tumulus de pierre et de terre. Il a été daté de 2200 avant J.-C grâce aux os calcinés retrouvés à l’intérieur.

Le dolmen els PasqueretsLes murs de pierre sèche délimitent les parcelles ; au bout du chemin parfois empierré, je croise la voie antique, qui probablement emprunte le même itinéraire qu’un chemin plus ancien. Le balisage devient jaune, un panneau représentant une coquille signale le chemin de Compostelle. Colonisés par les romains, les kérétanis, peuple qui occupait les lieux, se sont mélangés à la civilisation romaine du nouvel empire (-121). Pour découvrir le dolmen els Pasquerets, il faut grimper le long d’un grillage après quelques dizaines de mètres sur la Via Cerdana.

le pont de bois et ses piles romainesle pont mégalithiqueAu point marqué « pont romain », ce n’est pas là qu’il y a le pont, je descends par la gauche jusqu’au pont de bois  dont seules la base des piles est romaine. Un peu plus loin, en passant sous le fil de fer, je peux voir le pont mégalithique sous lequel s’évade les flots d’un ruisseau. C’est un assemblage de roches érigé durant le néolithique. Ne sachant pas son existence, je n’ai pas vu le bloc de granit fendu, la fameuse roque del traginers, lieu de rendez-vous des traginers. Le traginer est une personne qui transporte des marchandises à l’aide de bêtes de somme comme le cheval, l’âne, le mulet ou le bœuf. Pendant de nombreuses années ils ont permis l’échange de produits (blé, orge, pommes de terre, le vin,…) entre les villages et villes. Ce sont les muletiers catalans. Photos sur le site des Pyrénées catalanes.

Le sentier qui grimpe après le pont mégalithiquemenhir d'Eyne dit des BassousesDemi-tour pour trouver à quelques dizaines de mètres le panneau indiquant le dolmen suivant : le sentier va grimper, sinuer, traverser un canal rustique, longer une forêt de bouleaux. Au croisement avec la D29, il faut continuer sur la route à droite puis reprendre le sentier sur la gauche. Là, le menhir des Bassouses (Del Bosc) se dresse sur fond de montagnes.

Blocs de granitLe chemin se poursuit entre les blocs granitiques épars qui jonchent les prés. Le long de la frontière entre Eyne (autrefois Eina) et Llo (autrefois le domaine d’Allius), un rocher porte une inscription médiévale gravée E et A, signalant la limite entre les deux communautés. Je ne l’ai pas trouvé malgré un aller-retour le long de celle-ci.

Pierre à cupules ?Un coureur qui fait le même parcours que moi en sens inverse, me salue alors que j’arrive au niveau des pierres à cupules. Je n’en ai jamais vu « en vrai » mais uniquement sur les photos d’Emmanuel Breteau, à l’exposition d’art rupestre de l’arc alpin qui avait lieu dans l’abbaye de Hautecombe en 2013 (Tour des Bauges J2). Je n’ai trouvé que des grosses cupules dont la couleur du fond me fait penser qu’elles ont peut-être contenu un liquide qui les a colorées.

Sur le site rando66, d’autres photos

Eyne pierre cupules (site internet)Une cupule est une forme de pétroglyphe réalisée à la surface de rochers ou d’affleurements rocheux. Il s’agit d’une dépression concave, de forme circulaire. Les cupules sont généralement de taille modeste, de quelques centimètres de diamètres. Parfois, plusieurs cupules sont reliées par une rigole. Le but de ces décorations n’est pas connu, pas plus que l’usage exact qui en était fait. Au vu de rigoles qui reliaient, dans certains cas, les cupules entre elles sur des surfaces plus ou moins horizontales, on a parfois pensé qu’elles étaient liées à des libations rituelles, mais les preuves d’une telle théorie font absolument défaut. wikipedia

Abri sous rocheL’abri sous roche est le dernier monument du circuit. Amas rocheux sous lequel une ouverture étroite donne accès à un abri. Il a servi d’abri temporaire de tout temps, 2000 ans avant J.-C., et 3300 avant J.-C.

Sentier ou ruisseau ?Fin du parcours vue sur EyneA partir de là, il faut être particulièrement attentif pour ne pas perdre le balisage jaune. Sur la toute fin du parcours, le sentier c’est le ruisseau qui aboutit le long du centre équestre. Il y a bien un sentier praticable à côté mais il est privé.

Site Pyrénées catalanes, beaucoup d’informations et photos

Télécharger la fiche rando

Une excellente mise en jambe avec ce circuit varié et facile qui nous fait plonger dans l’histoire la plus ancienne de la Cerdagne.

Image itinéraire Eyne sentier archeologiqueImage de l’itinéraire sur carte ©IGN 6km100, 127m dénivelée (+305, -301), 2h déplacement (2h40 au total avec visite). L’extrémité des flèches rouges < indiquent la géolocalisation des points d’intérêt.