Le sentier du contour du Bois à Willeman

Alors que nous buvions du vin de Vacqueyras (Vaucluse) à Vacqueriette-Erquières (Pas-de-Calais), nous nous sommes étonnés que la racine du nom soit la même. Après recherche, pour le Pas-de-Calais où existe aussi Vacquerie le Boucq, le nom vient  de l’ancien français vaque qui veut dire vache. En patois,  mon grand-père disait « eune vaque ». Pour Vacqueyras, sachant que lou vacquié gardait les vaches, qu’il y a de nombreux patronymes Vache dans la région, que les noms de famille furent autrefois tirés de spécificités locales, je serais tentée de dire qu’au nord comme qu’au sud, les vaches en sont à l’origine. L’auteur de confidences de dégustation semble du même avis. Merci aux spécialistes de la toponymie de me donner leur avis !

img_4377r.JPGimg_4380r.JPGOù suis-je donc  en ce 24 juillet 2007 ? à Willeman (qu’on écrit Vilmans à l’époque de Cassini vers 1750), petit village de 162 habitants dans le Pas-de-Calais. Je suis alors en vacances à Vacqueriette-Erquières et ce village n’est qu’à quelques kilomètres du gite. C’est d’abord l’église fortifiée Saint-Sulpice qui attire mon attention : elle est flanquée de 4 tours ; elle permettait aux villageois de s’y réfugier en cas de troubles. Ce clocher construit probablement au XVème siècle, appartient à la commune de Willeman qui le restaure. Ces travaux bénéficient des aides de l’Etat et du Conseil Général et sont suivis par André ANGEZ, Architecte. Comme quoi l’église et l’état font parfois bon ménage. Avec une nef du 16ème, un choeur de 1770, assurément, elle mérite d’être classée monument historique.  

img_4381r.jpgchateau-willeman.JPGLes abords boisés de la rivierette (= petite rivière ?) sont fleuris de mille couleurs, comme un pied de nez au mauvais temps, mais c’est aussi une invitation à la promenade. Dans une des nombreuses et grandes propriétés le long de la route, deux ânes paissent tranquillement. Tout comme dans les Alpes, ils portent souvent les bagages des randonneurs. Plus loin, le château, bien caché derrière son rideau d’arbres, laisse entrevoir un style élégant du XVIIIème siècle (photo de face extraite du site Oeuf-en-Ternois). Dans la lumière du soleil, je oet_willeman_chateau.jpgdevine le pigeonnier carré (1729) dont la toiture et la façade sont protégées au titre des monuments historiques.  La route se poursuit dans un sous-bois frais et humide.

Alors que la seigneurie de Willeman était détenue par la famille de Grigny depuis plusieurs siècles, le mariage de Perrine de Grigny, en 1401, la fit passer dans la maison d’Ailly. Peu de temps après, elle fut vendue à Guy Guilbaut, receveur des finances du duc de Bourgogne. Elle appartint ensuite successivement aux d’Ongnies, de Brimeux, de Croy, de Baulainvillers, d’Estebecque et enfin aux L’Hoste. L’un de ses membres fit d’ailleurs ériger en marquisat la terre et seigneurie de Willeman. La famille L’Hoste de Willeman, éteinte, portait d’argent au chef d’azur à la bande échiquetée de gueules. (Extrait de la page de la communauté de communes Canche-Ternoise consacrée à 7 vallées Canche Ternoise)

champs-willeman.JPGLe contour du bois oblique le long des champs, immenses étendues contrastant avec les bancs de nuages moutonneux. A ma droite, dans les bois, les oiseaux se font entendre. Après avoir trouvé la cache le sentier du contour du bois, déposée par Miss Fuzzy Bear, je cherche comment rejoindre la route. Plus de panneau indicateur. Après un regard vers l’église, je descends en quelques lacets dans une ornière boueuse  ; j’atterris dans une propriété privée en travaux dont je ne sais comment sortir… Aucun Willencourtois à l’horizon : je saute du haut d’un muret bien instable et m’esquive promptement.

Itinéraire du contour du bois à Willeman, 2.5km, 42m dénivelé (fin de l’itinéraire corrigé)

Ce qui est le plus agréable dans cette simple petite balade, c’est que la nature est toute en verdure et en fleurs, avec un côté british, comme dans beaucoup d’autres villages de la région.

L’abbaye Saint-Félix de Montceau à Gigean

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Que de fois j’ai vu écrit sur les cartes IGN « ruiné » en parlant de tel ou tel monument. Ce fut le cas de l’abbaye de Montmajour, c’est encore le cas pour celui-ci et c’est injuste. D’accord, cette abbaye n’a plus de toiture mais mérite-t-elle pour autant le terme péjoratif de « ruinée » quand on sait que tant de bénévoles s’occupent à la restaurer ? J’ai pu voir combien elle voulait vivre : une Association de sauvegarde active, des jardins fort bien entretenus, des spectacles organisés dans ses murs et un site web dédié l’abbaye Saint-Félix de Montceau : le site officiel.

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IMG_3234.JPGIMG_3216.JPGNous montons d’abord au sommet de la colline,  sur les contreforts du massif de la Gardiole1, par la boucle la plus courte (1,5km), jalonnée de panneaux d’information. 10km de sentiers sont balisés. En VTT ou à pied, qu’importe ! Arrêtez-vous pour le point de vue sur l’abbaye d’un côté, la mer ou les les_pierres_ont_la_parole.jpgétangs de l’autre. Du haut de img_3683.JPGl’escalassoun, ressemblant fortement à celui de la Camargue d’autrefois, Ti’Mars… s’est essayé à la surveillance des troupeaux. Mieux vaut ne pas avoir le vertige… Non loin de là, le(s) trésor(s) que nous cherchons : celui d’Alice = boîte cachée l’abbaye pour le jeu de geocaching , et l’abbaye elle-même, trésor de notre patrimoine religieux.

IMG_3237.JPGDe la route et de l’autoroute, on voit déjà les murs de l’abbatiale, imposante sans doute à cause des revenus dont disposait la communauté et de l’orgueil de la prieure car rien ne justifiait un tel luxe : elle ne recevait ni prince, ni roi.

Côté parking, difficile de reconnaitre l’infirmerie, le bâtiment des converses (moniales converties), l’entrée principale la plus usitée qui n’a été découverte qu’en 1992. Le grand portail nord était interdit à tous, sauf à l’évêque et au curé venu faire la messe.

enfermerie.jpgJe suis surprise en lisant l’histoire de l’abbaye qu’elle comportait une prison (enfermerie, photo du site non officiel et artistique l’abbaye Saint-Félix de Montceau XI-XIVème siècle Gigean) ; elle avait pour but de châtier les soeurs qui avaient grandement fauté. Pas de problème d’identification pour la citerne. Sa taille montre que l’eau de source ne devait pas manquer. D’ailleurs les villageois de Gigean venaient tremper le buste de Saint-Félix dans la citerne pour faire revenir l’eau en période de sécheresse. Elle était voûtée, avec un plancher et pouvait servir à la fois de réfrigérateur pour les provisions, et de réserve d’eau.

IMG_3240.JPGIMG_3241.JPGA l’intérieur du périmètre, une construction bizarre, trapue, est collée à l’abbatiale et surmontée du socle d’une tour. On devine que plusieurs constructions se sont succédées au cours des siècles. C’est une ancienne et petite chapelle romane… le dernier enfeu2 se trouvant dans le choeur, a été obturé et bâti en pierres froides3 pour permettre la construction du clocheton gothique, juste au-dessus. Extrait du site Abbaye Saint-Félix de Montceau . Ce que j’ai pris pour une tour n’est donc qu’un clocheton !
IMG_3229.jpgNous continuons la visite par le jardin monastique médiéval : le verger cimetière4 (mûriers, noyers, pêchers, néfliers,…), le potager, le jardin médicinal (des simples, c’est à dire des plantes dotées de puissants symboles), le jardin des senteurs qui était à la fois un lieu de recherche et de méditation, un lieu de dialogue entre Dieu et l’homme. Ainsi, la configuration circulaire symbolise le ciel ; le carré interne évoque la terre (qui était plate à l’époque ne l’oublions pas !), la croix évoque les 4 axes du monde ou les 4 fleuves de l’Eden, au centre figure l’arbre de vie et enfin, les fleurs louent la bonté du Seigneur. Extrait du blog Eldorad’Oc. Quelques paroles de sagesse, plantées dans le jardin, interpellent le promeneur : promeneur, arrête toi un peu, repose toi, pense à toi et tu seras le maître de ta vie. Ne cours pas après elle, mais profite du jour présent.

gigean-abbaye-interieur.jpgL’abbaye étant fermée, nous n’avons pas eu la chance de la voir de l’intérieur. Heureusement Alderic a bien voulu me confier la photo ci-contre.

Le sentier de la pierre dans le massif de la Gardiole – 2 circuits – 10km environ (le plus petit ne figure pas sur la carte mais il est très bien repéré sur le terrain)

Sur le sentier de la pierre, vous trouverez la petite  grotte de la pierre tintante. Un trou de 10m de profondeur en forte déclivité constitue un véritable piège pour les amateurs curieux. Une légende rapportée dans un journal de 1860 Les fiancés de la Gardiole (format word), raconte que pendant les périodes de grande sécheresse, les habitants de Gigean allaient jeter une figurine en plomb dans ce trou ; elle avait le pouvoir de faire cesser le fléau. Une procession spéciale accompagnait la figurine jusqu’au gouffre de Gigean. Peut-être est ce là l’origine du nom de la grotte, le plomb dans sa chute, faisant tinter la pierre…

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1gardiole (de garder) : lieu où l’on gardait autrefois les troupeaux de moutons
2enfeu : niche funéraire en arcade, à fond plat, ménagée dans les murs d’une église
3pierre froide : les pierres sont de dureté différente, de la pierre dure (ou froide) à la demi-ferme et tendre
4verger cimetière : Le verger, pomarius, accueillait fréquemment les moines dans leur repos éternel d’où le nom de verger-cimetière ; il avait donc lui aussi son aspect utilitaire intimement lié au symbolisme religieux, évocation terrestre du salut de l’âme du défunt au paradis (extrait du site Société des Amis de Port-Royal)

** L’ermite de la Sainte-Baume de Lirac

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« En l’année 1647,… Joseph Queyranne,… habitant Lirac, travaillait à un four à chaux, à la combe de Vallaurouse, avec quatre autres. Ayant été obligés par un temps de pluie et de tonnerre de se mettre à couvert dans la grande baume1, ses quatre camarades s’étant endormis, ledit Qeyranne qui était attaqué du haut mal, deux à trois fois par semaine, img_2485.JPGressentant les approches de son attaque commença à se promener à grands pas d’un bout à l’autre de la baume quand tout à coup à la lueur d’un éclair, il vit paraitre dans un petit trou du rocher, une image de la Sainte-Vierge en marbre… ; il la prit… la cacha dans sa besace, la porta chez lui, la garda trois jours sans rien dire ; mais l’ayant déclaré à Guillaume, son frère aîné et celui-ci à monsieur le prieur, ce dernier fut la prendre dans leur maison et la porta décemment à l’église. »

L’archevêque ordonna la création d’une chapelle dans la baume pour y venir en pélerinage. Notre dame de Consolation était née.img_2498.JPG 
La nouvelle que Joseph Queyranne semblait guéri de sa forme d’épilepsie se répandit rapidement img_2499.jpget l’on vint en pélerinage implorer la guérison des malades. Plusieurs miracles furent enregistrés. Queyranne fit le voeu de vivre à perpétuité comme ermite de la grotte. On construisit un ermitage qui fut agrandi en 1712. Le dernier ermite abandonna l’ermitage en 1903.

Quand il souffrait de solitude, il sonnait la cloche pour img_2502.jpgsignaler aux travailleurs des environs qu’il espérait une visite. Découragé, il finit par revenir au village et mourut 3 ans plus tard de ce fameux mal qui l’avait repris. Pour compenser le voeu qui n’avait pas été tenu, la paroisse s’engagea à aller en pélerinage à la baume trois fois par an.  Pour la circonstance, la statuette du XVème siècle (cachée là durant les guerres de img_2493.JPGreligion ?), habituellement conservée à l’église paroissiale, est portée en procession jusqu’à la grotte.

Cette baume qui servit de refuge depuis la préhistoire, permit aux habitants d’échapper aux troupes huguenotes du baron des Adrets durant les guerres de religion.

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A l’heure de ma visite, la grotte est fermée. Je commence ma partie de chasse au trésor qui me fait tourner autour du soupirail qui domine la grotte. Je ne trouve pas la cache ; mais d’où a pu être prise la photo censée me guider pour trouver l’endroit ? Finalement, c’est une erreur d’altitude ; je grimpe de quelques mètres et je la trouve. Merci Buckfast ! grâce à cette cache, la journée fut passionnante et pleine d’imprévus.

Vue depuis l'ermitageJe redescends jusqu’au soupirail grillagé. Je devine dans la pénombre des  chaises alignées ; quelques minutes plus tard, une voix résonne à l’intérieur puis la cloche sonne comme une invitation à pénétrer dans l’ermitage. Olivier (de l’Association les Amis de la Sainte-Baume), fort gentiment, me fait visiter la grotte, une visite rien que pour moi. Passionné, aimant ce patrimoine spirituel comme s’il lui appartenait, il me montre au rez-de-chaussée : le creux de la grotte où est apparue la Vierge, la citerne, la cheminée qui fonctionne encore, la cuisine et la chambre de l’ermite ; par un escalier en colimaçon, nous arrivons à une autre chambre et à la sacristie. Pour ne pas déranger les ermites installés dans la grotte, un tunnel a été percé au XVIIIème siècle et sert d’entrée indépendante. Je suis autorisée à tirer sur la corde de la cloche dont le son attirera sans doute d’autres visiteurs.
Nous parlons de la restauration entamée par l’association et de l’exposition qui a lieu en ce moment à la salle des fêtes Henri de Régis. Un groupe de randonneurs venant de Lirac en passant par les grottes, rejoint bientôt l’ermitage. * Itinéraire pour se rendre à la Sainte-Baumeimg_2516.JPG

Sur les tables de la salle des fêtes, de grands albums rassemblent les articles de presse et les témoignages. Sur les panneaux, de superbes photos de la baume : comme j’aimerais en faire de semblables ! Deux autres membres de l’association me montrent la fameuse statue et les photos du baptême de la nouvelle cloche 350 ans après la découverte de la Vierge. Un vigneron de la Cave des Vins de Cru de Lirac me présente la cuvée du trentenaire de l’association. J’en achète trois bouteilles. Excellent et avec du caractère. (Si vous voulez de cette cuvée spéciale, adressez-vous à l’une des deux personnes indiquées en bas de page)

La comtesse de Sévigné encourageait le roi à boire du Lirac car ce dernier « lui faisait grand bien ». Selon la maison des vins  : « A déboucher 3 heures à l’avance, servi à 18°, ce vin trouvera sa plénitude dans 4 ou 5 ans. Accompagnera à merveille un gigot de sept heures, un magret de canard, un véritable coq fermier ou une selle d’agneau farcie aux champignons. » Le propriétaire du Château de Clary à Lirac avait importé des Etats-Unis des ceps porteurs du phylloxera. Les vignobles devinrent des oliveraies. Ce n’est que dans les années 30 que le vignoble réapparut de façon significative. Le décret du 14 octobre 1947 signe l’avènement d’une nouvelle appellation : AOC Lirac, mais surtout du premier cru des Côtes du Rhône à produire des vins dans les trois couleurs : rouge, rosé, blanc.

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1baume : grotte

Bibliographie : la Sainte-Baume de Lirac : sa grotte, son ermitage, son pélerinage – les Amis de la Sainte-Baume (Lirac Gard), C. Lacour ed, 1989

Pour se renseigner : tél. secrétaire 04 66 50 47 70 ou président 04 66 50 40 88 à Lirac (30126)