Randonnée avec les ânes à Saint-Erblon

IMG_7773.jpgJe ne connais pas les ânes ; j’aimerais pourtant partir en randonnée avec Lilou, 4 ans1/2, qui serait sur l’âne tandis que je le guiderais. Pour en savoir plus, je profite des Randofolies 2011 (version archivée) de Saint-Erblon (Ile et Vilaine) pour faire une randonnée avec l’association des âniers du pays de Rennes.

Les citations qui illustrent cette note sont extraites du livre rafraîchissant, plein d’humour et de philosophie, de Gérard Ponthieu, Le tour d’un monde en sept jours avec un âne en Provence , Éd. Le Condottiere, 2009. Vous pouvez le télécharger depuis son blog C’est pour dire

Tandis que les enfants caressent le poil rêche des ânes, je pose ma première question concernant le caractère des ânes qu’on dit ‘têtus’ ; est-ce vrai ? la première personne me précise que si l’on connait les ânes, il n’y a aucun problème pour les faire obéir, pas besoin de carottes pour les faire avancer, pas de brutalité. Le second ânier insiste le fait que l’âne reconnait son maître à la voix et obéit à quelques ordres tels que ‘avance’, ‘à droite’, etc. : travail d’éducation long et répété comme pour les enfants. Le troisième est persuadé que chaque âne a son caractère et qu’il faut donc agir en fonction de celui-ci : placide et têtu, jeune et imprévisible, enfantin et malin. Le quatrième est fier d’avoir gagné le concours d’attelage.

[…] Cinq six enfants joyeux accourent à la rencontre des visiteurs inespérés – surtout du quadrupède bien entendu. Les questions fusent avec les caresses. […] Ce désir de toucher l’animal, son poil, lui frotter le chanfrein jusqu’aux naseaux … Peur de cette grande bouche aux dents saillantes.

Tous les âniers appellent leur animal par leur nom, l’initiale indiquant l’année de naissance, ou un affectueux surnom, comme on le fait avec nos enfants.

Y’a pas, on fait couple. Y compris avec les disputes. Hein mon Juju. Tiens voilà que je le rebaptise. Ouais, ça sera Juju.

IMG_7778.jpgIMG_7786.jpgDépart en procession avec un peu de retard : deux attelages, un âne à la longe, quelques autres bâtés pour permettre aux enfants d’être transportés sans fatigue. Grison, Virus, Quinto et quelques autres partent donc pour un circuit dans la campagne autour de Saint-Erblon. Des champs, des bois, des étangs, des sentiers parfois boueux et une odeur de campagne marquée. Chaque ânier tient le licol court et recommande aux parents de tenir leurs enfants près d’eux : ils ne doivent pas passer derrière l’âne.

Il marche plutôt bien mon petit âne provençal. Surtout si je le tiens court, […]

La conduite de l’âne se fait sur la gauche de l’animal. Il porte facilement 40 kg et marche 30 à 40 km par jour. Sa vitesse de croisière est de 4 à 5 km/h mais il s’adapte à votre rythme. extrait du site Les ânes sont dans le pré. A chaque arrêt avant de traverser une route la caravane s’arrête pour permettre aux retardataires de rejoindre la tête. Les âniers en profitent pour raconter des histoires d’ânes, évidemment. Deux ânes se mettent à braire sans raison, se répondent, et leur cri résonne dans la campagne.

Sauf que Juju, […] va braire. Comme un âne ! Enfin qu’ont-ils à se dire d’aussi important et urgent, ces deux là qui […] s’envoient des hurlements de corne de brume ?

L’animateur interrompt les voitures pour nous permettre de traverser. Les ânes en profitent pour discrètement manger l’herbe fraîche et les âniers ont bien du mal à les en empêcher.

On papote deux minutes le temps pour Julot de boulotter en douce la sauge bleue du jardinet.

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** Les mégalithes de la lande de Cojoux

IMG_7813.jpgUn paysage de landes qui m’est totalement inconnu ; l’association Natures et Mégalithes promet de nombreuses curiosités. C’est donc bien tentant de rejoindre Saint-Just en 45mn à partir de Rennes. Le temps est gris, incertain. Le boulanger, juste avant sa fermeture dominicale, me remet gracieusement le carnet de découverte. IMG_7820.jpgIl est midi quand je me mets en route à partir de l’église, construction en schiste et granit du pays. Guettez les flèches vertes du parcours pour ne pas vous perdre !

Construite en 1848 elle [L’église] est bénie en mai 1852. […] la rénovation la plus marquante reste celle de 1928-1930 qui voit l’agrandissement de l’église par le bas-côté. Extrait du site de la mairie de Saint-Just

IMG_7818-500x375.jpgAprès le parking réservé aux handicapés, je traverse le hameau du Châtaignier composé de quelques vieilles maisons, village-rue constitué de longères1. Après une courte montée, je découvre la lande bretonne, vaste étendue uniforme et peu fertile abandonnée depuis longtemps, dépaysante pour moi qui vis en Provence ; rien n’arrête le regard, sauf parfois au détour d’un virage un mégalithe impressionnant ; des bosquets de genêts tout au long du parcours, ponctuent de jaune les vertes prairies ou les pelouses.
IMG_7822.jpgIMG_7902.jpgJe passe à côté du moulin, probablement à grain, le sarrazin étant la seule céréale cultivable sur ce sol acide. Dans un enclos deux chevaux du Poitou, trapus et placides, entretiennent l’espace naturel : ils s’approchent de la clôture à mon approche ; une mare me parait bien incongrue à cet endroit : ancienne carrière abandonnée où le propriétaire venait extraire le schiste pour des constructions locales. Le Conseil Général les préserve pour maintenir l’équilibre de l’environnement.

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Il n’y a pas que dans les Alpes qu’il y a des Demoiselles, blocs de pierre dressés verticalement appelées ici Roches piquées : l’une est en poudingue de Gourin fait de petits galets de quartz, l’autre est en quartz recristallisé et plissé. Mais d’où provient ce quartz puisque nous sommes dans une zone de schistes ? Il n’y en a pas à moins de 3km d’ici, dans les landes de Quily… Ils faisaient peut-être partie d’un alignement de menhirs. Une tradition populaire raconte que ce sont des jeunes filles trop insouciantes qui auraient été transformées en pierre pour avoir dansé sur la lande au lieu d’assister aux vêpres du dimanche. Aux Mées, en Provence, ce sont des moines ayant osé poser leur regard sur des femmes, qui ont été pétrifiés (voir la note sur les pénitents des Mées dans ce blog).

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Brume du Vercors (suite et fin)

—> Brume du Vercors, première partie (à lire en premier)
Quelques commentaires sur le site bivouak.net

(Toutes les photos ont été prises en temps réel dans le feu de l’action)

Un an après le sauvetage, en Juillet 2006, Chiemi & Kévin sont au Japon et, comme toujours pendant leur absence, je parcours les montagnes du Vercors et des Ecrins. Ce matin là, je pars tôt, pour gravir la Balme et rejoindre le pas Ernadant hors sentier. Sur mon chemin, la cabane de Combeauvieux, celle de Cyril, le berger. Quand j’y arrive, les chiens viennent vers moi en jappant, je les caresse puis j’entends le berger qui, une centaine de mètres plus bas, les appelle. Ils n’obéissent pas et cela a l’air de l’agacer sérieusement, il ne me regarde pas, ne me parle pas.

Timidement je l’interpelle en mettant mes mains en porte voix : « Bonjour, c’est moi qui vous ai ramené un agneau l’an dernier dans le brouillard ! ». A ma grande surprise, il se met à courir vers moi en hurlant « Elle est vivante, elle est vivante !!! ». Je ne comprends pas tout de suite de qui il parle car, pour moi, l’agneau est mort et en plus, il utilise le féminin. Il arrive vers moi, me prend la main qu’il serre vigoureusement et me dit tout essoufflé : « C’est une belle petite brebis, elle est vivante, venez dans ma cabane, on va prendre le thé, je vais tout vous expliquer… »
Cyril est un véritable personnage : ethnologue de formation, berger l’été et marionnettiste l’hiver, ce n’est pas banal !
Il m’explique tout :

Ce qui l’a sauvée, cette brebis, c’est qu’elle était vraiment trop mignonne. Le lendemain de son sauvetage dans le brouillard, deux pisteurs de Villard-de-Lans sont passés, je leur ai raconté son histoire et ils se sont tout de suite attendris sur elle. Comme vous, ils m’ont demandé d’essayer de la nourrir et, dés le lendemain, ils remontaient pour me donner biberons et lait maternel achetés par leurs épouses. Elle était tellement mignonne… J’ai donc commencé à la nourrir au biberon, il me fallait lui donner un nom et, vu les conditions dans lesquelles vous l’aviez trouvée, j’ai tout simplement choisi « Brume ».

Il continue son histoire :

Quelques jours plus tard, j’ai trouvé le cadavre de celle qui devait être sa mère. Brume est donc devenue une mascotte qui répond à son nom presque comme un chien, elle est adorable et très gourmande. Elle nous sert pour guider le troupeau dans les endroits difficiles. Elle a un statut très spécial puisqu’elle se situe entre le chien et la brebis. Elle a encore échappé plusieurs fois à la mort, l’an dernier 30 brebis ont été foudroyées par un seul et unique coup de foudre, elle était juste à coté. Elle a ensuite pris une maladie et a encore failli y rester. En ce moment, elle n’est pas dans mon troupeau, vous ne pourrez pas la voir, elle se trouve dans le troupeau de Christelle sur le plateau du Cornafion.

La nouvelle est incroyable, je suis vraiment très surpris et très heureux de la tournure des évènements, j’imagine la joie de Kévin & Chiemi quand il vont apprendre ça…
Il nous faut absolument la revoir !
Plusieurs fois en 2006 et en 2007, nos tentatives se solderont par des échecs : orages pendant l’ascension ; localisation du troupeau impossible ; arrivée trop tardive dans la saison, elle avait quitté les alpages, etc.

En juillet 2007, deux ans après le sauvetage, nouvelle tentative : je suis seul et je décide d’aller trouver une fois de plus Cyril, cette fois dans un autre endroit, la bergerie de la Fauge ou il estive avec Christelle. Habituellement, il monte tous les jours voir son troupeau sur l’alpage situé sous le roc Cornafion à près de 2000 mètres d’altitude mais aujourd’hui, c’est dimanche et il a des invités, je lui propose donc d’y monter à sa place et c’est devant un bon café qu’il m’explique par ou passer car il n’y a aucun sentier et la pente terminale est très raide… Il me prévient que Brume répond bien à son nom quand elle est dans la vallée ou en bergerie mais qu’il n’en est pas de même en alpage et surtout avec un inconnu, il est certain qu’il me sera impossible de l’identifier et encore plus de l’approcher mais il m’en fait une description précise au cas ou…
Quand j’arrive sous le roc que je connais bien puisque je l’avais escaladé l’année précédente, je repère tout de suite le troupeau qui s’abrite sous un porche naturel taillé dans la falaise. Ne sachant pas trop comment procéder, je m’approche doucement sans grand espoir en appelant  » BrumeBrumeBrume… ».

 

Tout le troupeau m’observe craintivement puis, quand je suis à 10 mètres environ, la grande majorité des brebis se détourne et marche doucement dans la direction opposée pour me fuir. J’approche encore un peu en continuant d’appeler Brume, les dernières téméraires cèdent aussi à leur instinct et me tournent le dos pour s’éloigner de moi sans hâte. Toutes…. sauf une ! Elle reste là, elle me regarde et semble captivée par ma voix. Je n’ose y croire….

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