Auvillar -Saint-Antoine Pont d’Arratz

Troisième jour de notre chemin de Compostelle avec la plus petite étape  ; la canicule étant annoncée, nous apprécierons sûrement la brièveté du parcours.

A la table du petit déjeuner, un technicien itinérant qui travaille dans les centrales nucléaires ; en ce moment il a installé son camping-car dans la propriété Sarraut et vient prendre son petit déjeuner avec nous avant de se rendre à Golfech. Nous évoquons les deux tours géantes et leur énorme panache de fumée ; il nous rassure : « ne vous inquiétez pas la fumée n’est pas toxique : c’est de la vapeur d’eau ! ». Certes, mais le plus grand danger n’est peut être pas celui-là… »

Je note le raccourci vers le GR65 que schématise M. Sarraut sur un petit bout de papier ; nous préférons terminer notre visite d’Auvillar ; la dame de l’office du tourisme tamponne notre credential d’un dessin bleu aux traits épais représentant la porte de l’Horloge, la halle et l’église, les trois monuments importants du village ; fière de son village, elle nous vante les trésors de l’église qui vient juste de réouvrir ses portes après une longue période de retauration ; elle n’a plus à la vente de livret sur l’histoire d’Auvillar mais il est disponible au musée de la batellerie ou à la presse en face (pas la presse, c’est une erreur) ; elle nous invite à rester ce soir à la fête de Saint-Noé que habitants préparent déjà : les caisses de vin s’entrechoquent, les drapeaux colorés s’accrochent aux monuments, le kiosque est en cours de montage sur la place du château. Du belvédère sur la vallée, nous reconnaissons le long pont sur la Garonne, l’église d’Espalais, le château de Lastours et… les deux tours de Golfech.

Entre-temps, les jeunes filles de la cité […] portent le fameux tourin1 aux œufs dont chaque fochaire2 remplira généreusement son écuelle. Ensuite, le chabrot3 […] lavera les reliefs du tourin restés dans l’écuelle. Puis, celle-ci reprend sa place au fond du havresac4. Après le dîner, la procession dite des Arbudets5 se déroule selon un rituel très précis. Sur une barrique trône Bacchus, un jeune du village, porté en cortège. Aux bruits des sabots, la joyeuse troupe danse […]. Extrait de la fête de Noé à Auvillar, P. D’AOUBILA

Recette du Tourin

Nous quittons Auvillar par la rue Saint-Jacques. Vivement le premier chemin campagnard qui se courbe en douceur : des arbres, des prairies et le ciel bleu ; un sentier entre haie et bois ; un très long lombric se met en travers de notre chemin ; au sortir du bois du Ruisseau Profond, après un court arrêt sous le pont de l’autoroute où nous espérions de la fraîcheur – mais nous n’avons ressenti que la chaleur renvoyée par le macadam – un champ jauni par le soleil ondule.

La longue plaine de Bardigues en plein soleil sur la D11 ne nous donne pas envie de nous arrêter pour les photos. Du côté droit sous l’arbre, une tour qui pourrait avoir été un pigeonnier, nombreux la région. Le panneau de Bardigues à l’entrée du village nous fournit trois informations : en occitan, Bardigas, sur la D11, classé village fleuri par le conseil national des villes et villages fleuris, situé en pays de Brulhois Le Brulhois est un pays de terrasses et coteaux fluviatiles bordant la Garonne).

Au loin l’église paroissiale Notre-Dame de Bardigues, du XIIIe siècle  mais reconstruite en 1841, que nous n’aurons pas le courage d’aller visiter. Au bout de l’allée du château de la Motte (reconstruit au dernier quart du XVIIIè), un parc dont on devine l’agencement symétrique sur la photo aérienne. A l’intérieur des tapisseries d’Aubusson fabriquées au XVIe siècle. Dans ce domaine familial, chaque année l’été, un membre de la famille Boisséson organise un concert au château : en 2013 c’était au tour de Pierre, leur neveu.

La seigneurie de Lamotte-Bardigues acquise par Raymond Arnaud de Goth en 1315 reste dans cette famille jusqu’en 1594, date à laquelle elle passe à la famille de Cruzy-Marcillac. En 1625, le château appartient aux Esparbès de Lussan. […] lors de la construction du château au 18e siècle, certains murs de l’édifice antérieur ont été conservés. Il est possible d’en suivre le contour partiellement au Sud et en totalité à l’Ouest où deux tours ont été maintenues. Etude du patrimoine Midi-Pyrénées : le château de Lamotte à Bardigues, 1948, avec plans et photos de l’époque

Nous quittons enfin la route pour retrouver un tout petit d’ombre et quelques fleurs en bordure du chemin. Le double piédestal de la croix de chemin peut porter pas mal de cailloux ; chaque pèlerin de Compostelle y a déposé le sien, symboliquement s’est donc débarrassé du superflu.

L’indication d’un tumulus sur la carte IGN, ne pouvait me laisser indifférente ; ce n’est qu’après quelques heures de recherche que j’ai trouvé ce que c’était : regardez la photo aérienne de 1950 ; le diamètre approximatif de ce tumulus est de 21 m, il est surélevé ; il est proche du château de Lamothe (300m à vol d’oiseau) cité dès le XIVe. je pense qu’il s’agissait d’une motte militaire du XVè désormais colonisée par quelques arbres, comme le rapporte le Bulletin archéologique publié sous la direction de la société archéologique de Tarn-et-Garonne : répertoire archéologique, T.2, Devals Ainé, Montauban, Janvier-Février-Mars 1872.

Une motte castrale est un type particulier de fortifications de terre qui a connu une large diffusion au Moyen Âge. Elle est composée d’un rehaussement important de terre rapportée de forme circulaire, le tertre. […] La plupart du temps le tertre était entouré d’un fossé, le sommet étant occupé par une forte palissade. Un fortin de bois y était aménagé avec une tour de guet analogue à un donjon. Selon wikipedia

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Boudou – Auvillar par Malause

Deuxième partie de l’étape officielle du chemin de Compostelle Moissac-Auvillar : Boudou-Auvillar.

Les sept filles et nous prenons notre petit déjeuner tôt vers 7h15, un petit-déjeuner de marcheuses. Jenny appose le tampon de Compostelle sur notre « crédential del Peregrino » ou credential, passeport du pèlerin de Compostelle qui atteste de notre marche jusqu’ici. Après quelques photos souvenirs du couple Smither avec leurs chiens, nous quittons Pugnal sous un ciel nuageux.

Cela va commencer par une longue montée en sous-bois bordée de fleurs sauvages… Le sentier suit le GR de Pays de Quercy – Pays de Serre puis débouche sur une route à Bourdailles. Sur un poteau de bois est clouée une pancarte « Chemin clunisien Guyenne-Gascogne », un autre itinéraire reliant les sites qui respectent les règles de l’ordre de Saint-Benoit ; ils sont nombreux ces itinéraires culturels ou historiques : celui de Saint-Martin de Tours (rencontré lors d’une randonnée le long du Cher), Transromanica (itinéraire roman du patrimoine européen), Stevenson, chemin cathare, etc.

Chemin clunisien : l’association de mise en valeur du Patrimoine de l’Abbaye de Saint-Maurin et la fédération des sites clunisiens ont été à l’initiative de la création d’un chemin de randonnée nommé « chemin des 3 M » d’une distance de 80,5 km relevant 3 sites clunisiens dont l’Abbatiale de Moissac, l’Abbaye de Saint-Maurin et le Prieuré de Moirax.

Peu avant le hameau de Massip, deux cheminées au loin projettent haut dans le ciel leur panache de vapeur d’eau ; elles nous suivront pratiquement jusqu’à la dernière étape, dépassant d’une bonne hauteur les plateaux et les champs. Ce sont les deux tours aéroréfrigérantes les plus hautes d’Europe (178,5 mètres de haut) de la centrale nucléaire de Golfech : elles assurent un circuit de refroidissement semi-fermé pour chacune des unités de production. Le pompage en Garonne sert à compenser l’évaporation des aéroréfrigérants et à refroidir des circuits auxiliaires de sûreté […].

La centrale nucléaire de Golfech […] produit de l’électricité à partir de l’énergie dégagée par la fission nucléaire de l’uranium. […]. Chaque tranche est équipée d’un réacteur nucléaire à eau pressurisée (REP) […] mises en service respectivement en 1991 et 1994.
En 2013, le site a produit 19,2 milliards de kWh (19,2 TWh). [Il] emploie 939 personnes quotidiennement (739 salariés EDF et 200 prestataires). Extrait de wikipedia

Nous marchons sur la route ; au carrefour avec la D4, c’est Claire qui repère la route de Sainte-Rose ; doublées par un pèlerin pressé, nous prenons le temps de visiter la chapelle Sainte-Rose, et son cimetière qui domine la vallée de la Garonne. J’en fais le tour, entre dans l’église ouverte contrairement à celles de la région PACA où elles sont souvent fermées. Des éléments de styles différents : romans comme l’ancien chœur, un portail du Moyen Age avec, au centre de l’archivolte, le haut d’un personnage qui se « prend la tête », un bénitier à godrons1 du 17è, un retable du 18è et une tribune qui repose sur une double arcade appuyée sur un pilier central. Et toujours un peu de cette couleur de brique rose que l’on retrouve dans la plupart des constructions de la région.

L’église Sainte Rose de Viterbe est datée du 12e ou 13e siècle. […] L’église Sainte Rose est un édifice composite, qui porte la marque de nombreuses reprises. Elle est dédiée à Sainte Rose de Viterbe […]. Indépendante à l’origine, elle fut à partir du 13e siècle, et suite à l’insuffisance des revenus, unie à l’église Saint Jean, dont elle est désormais l’annexe (sauf au 19e, où jusqu’en 1862 elle fut église paroissiale).
[…] On venait autrefois à Sainte-Rose en pèlerinage à cause de l’huile de la lampe qui avait la réputation de guérir les maux pourprés (urticaire ou purpura) et à la suite d’un vœu.
Texte d’après le dictionnaire des paroisses du diocèse de Montauban

Claire ne me rejoint pas. Je la retrouve en grande discussion avec un cycliste qui vient de Slovaquie et compte bien rejoindre Compostelle cet été. Etonné de voir une femme avec un GPS, il me questionne : « Vous faites du geocaching ? » ; « Oui ! vous aussi ? » ; il ouvre la main qui cachait la petite boîte et son logbook ; je décide d’y ajouter mon pseudo. Nous comparons nos GPS : bon à savoir, le mien peut s’installer également sur un support pour vélo. Mais la coïncidence ne s’arrête pas là ; il habite près du couple sylani qui participait, trois jours auparavant, à la rencontre organisée par l’association Geocacheurs de Provence dans laquelle je milite depuis 10 ans. Le monde est petit… Une photo souvenir de Jean Bat’ et nicoulina immortalisera ce moment.

Eglise Sainte-Rose, lolo.ntj

Eglise Sainte-Rose, site de la commune de Malause

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Moissac-Boudou par le chemin de halage du canal latéral à la Garonne

Entre Moissac et Lectoure, cinq courtes étapes seront publiées ; certains les considérant comme étapes du chemin de Compostelle (GR 65) en parcourront deux en un jour, d’autres les voyant comme randonnées, déposeront un véhicule à l’arrivée de l’étape. Pour cette première expérience, mon amie Claire et moi avons confié à La Pèlerine le soin des réservations des chambres d’hôtes, transport des bagages d’un gîte à l’autre, navette pour le retour à Moissac (Transport Claudine). Tout s’est bien passé. Nous avions seulement imposé deux choses : des demi-étapes pour privilégier les visites, les points de vue, les rencontres, le rythme lent, et de dormir au gite Ultreia à Moissac dont nous connaissions les propriétaires depuis l’an dernier.

Comme en 2016, nous avons pris deux personnes en covoiturage. A l’arrivée à Ultreia, Aideen s’est souvenue de nous ; Rom nous a offert une boisson et la conversation s’est engagée avec naturel, comme si nous ne nous étions jamais quittés.

Le jour de notre arrivée à Moissac (82), nous avons porté notre attention sur le célèbre tympan du XIIè et sur l’intérieur de l’abbatiale Saint-Pierre : nous n’avions pas eu le temps d’approfondir cette découverte l’an dernier.

L’album de Moissac

Le soir une belle et longue table est installée dans le jardin, tablée cosmopolite avec trois allemands, un couple de Nouvelle-Zélande, un norvégien et quelques Français du sud-est. Le repas est copieux et équilibré : soupe, viande accompagnée de trois légumes, glace avec abricots au sirop recouverts d’un coulis de fruits rouges ; Claire s’essaie à l’anglais qu’elle a révisé toute l’année ; son verre d’eau en déséquilibre sur la table de jardin inonde mon smartphone alors qu’elle fait le service ; aussitôt Rom l’essuie, le fait sécher au soleil, me recommandant de ne pas l’allumer tout de suite. iPhone sauvé des eaux !
Ce que je retiens de l’échange avec les Néo-Zélandais, c’est que la laine d’agneau des randonneurs (hikersWool pack) protège des ampoules au pied, par emballage de la zone d’échauffement ; elle se vend sous forme de rouleau de laine légère et fine, riche en lanoline. Elle offre un confort sans frottement et évacue l’humidité. 18 g, 3 jours de randonnée, 11.20 $ NZD soit 7.25€ environ. Vendue uniquement dans leur pays.

Le lendemain, nous quittons l’avenue Pierre Chabrié vers 9h20, les autres pèlerins sont déjà tous partis. Chabrié était un avocat talentueux, qui a exercé au barreau de Moissac. Il a été maire de Moissac pendant plus de vingt ans, et à plusieurs reprises au XIXè siècle. Ena Henri, Moissac aux deux bouts du XXè siècle. Témoin d’un autre temps, témoin de notre temps, Color-Press, 1998.

Pour cette première étape, nous suivrons les conseils de Rom : longer le canal, passer sur le pont bleu pour un détour jusqu’au centre nautique afin d’observer la confluence du Tarn et de la Garonne de plus près ; l’an dernier, nous l’avions vue d’en haut, à Boudou. Lire Moissac Boudou sur le chemin de Compostelle.

Après le pont au dessus du canal latéral à la Garonne, nous enfilons les kilomètres à l’ombre et à plat, parfait pour mon amie qui n’a pas l’habitude de marcher. Le clocher de l’église Saint-Martin émerge des maisons sur l’autre rive ; Saint Martin, comme Saint Saturnin et Saint Pierre sont les plus anciens hagiotoponymes1 correspondant à un culte dès le Ve siècle (fin VIè selon le toponymiste Auguste Vincent). 237 communes portent le nom de Saint-Martin et 175 celui de Saint-Pierre ! Nous allons tous les rencontrer dans les églises du Chemin. Dictionnaire des noms de rues, site de André Calvet.

Avec l’arrivée de la voie ferrée à Moissac, la destruction de l’église Saint-Martin fut évitée in-extremis par son classement comme monument historique. On doit ce sauvetage au génie du laborieux et savant Armand Viré. […] Toujours debout, l’église Saint-Martin abrite un hypocauste du IIIe siècle, des fresques du XVe siècle, et elle est une des plus anciennes églises de France. D’après Aymeric de Peyrac, les reliques d’Ansbert, deuxième abbé du monastère, furent déposées en 868 dans la chapelle Saint-Martin, qui prit alors le nom de Saint-Ansbert, qu’elle garda jusqu’au XIIe siècle. Armand Viré s’est retiré à Moissac en 1939, dans une maison de famille. Dictionnaire des noms de rues, site de André Calvet.

Eglise Saint-Martin, base des monuments historiques.

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