Le chaos du Chéran

J’ai repéré la fiche descriptive de la rando depuis longtemps ; à la faveur d’un séjour familial entre retraités, nous décidons d’aller voir le chaos du Chéran au départ de Cusy. C’est l’un des géosites majeurs du Parc Naturel Régional du Massif des Bauges, classé Géoparc Mondial UNESCO. Dans le groupe, Arnaud et Marie-Pierre sont des sportifs aguerris, Pierre et Josette n’ont pas l’habitude de marcher et moi, je marche régulièrement mais avec quelques difficultés en montée. Mais elle est classée facile, pas de quoi s’inquiéter en montagne…

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Le premier aléa, c’est qu’on est allé au point de départ par la fonction « Aller au départ » de l’application mobile Visorando ; elle nous a amené sur la mauvaise rive du Chéran par le sentier de la Passerelle à Gruffy, fermé à la circulation automobile. Conclusion : Mieux vaut conjuguer la technique GPS à la lecture des consignes données par l’auteur. Cet imprévu nous vaudra 100m de dénivelée en plus par un sentier caillouteux plutôt désagréable.

Mais la récompense est en bas du chemin : une rivière labélisée ‘Rivière Sauvage’, qui me paraît calme au niveau de la passerelle ; sentier facile en direction du pont de l’Abime, sur la rive droite, et qui longe un pré ; petits pièges au milieu du sentier où quelques racines émergent, une eau limpide sous les ombrages qui incite à la très fraîche baignade. De temps en temps un gros rocher au milieu de l’eau rappelle qu’autrefois les évènements géologiques ont dû être intenses.

La vallée du Chéran était un immense glacier il y a 40000 ans ; à la fonte du glacier il y a 15000ans, les forces qui s’exerçaient sur les versants ont disparu. Les bords ont basculé vers l’intérieur de la pente. C’est ce qui est arrivé aux Tours Saint-Jacques qui continuent de glisser tout en restant en équilibre… mais jusqu’à quand ?

Des panneaux d’information jalonnent le parcours : quel dommage que celui des oiseaux ne soit plus sonore. Un peu plus loin le sentier se dégrade : les rondins de bois se sont déchaussés. Une passerelle de bois au sol grillagé permet de traverser l’obstacle. Parfois une dalle est devenue instable ou les pierres de gué sont mal ajustées.

L’or du Chéran provient du délavage des molasses alpines. Les minéraux les plus lourds, tels l’or, se déposent dans le lit de la rivière. Dès le 13è siècle, des familles pratiquaient l’orpaillage comme activité d’appoint. Extrait de rando.geotrek.fr.

A la fin du XIXe Joseph Domenge dit Biolla, éleveur de chèvres à Alby, a trouvé une pépite d’or de 43g dans le Chéran ; en parcourant le circuit de la Mouche à Alby, vous retrouverez la statue de cette chèvre près du refuge du berger. Aujourd’hui, je pense que cette pépite vaudrait près de 13000€ ; Pline l’ancien, naturaliste (23-9 ap. J.-C.) évoque l’or du Chéran comme le plus pur (Histoire Naturelle, livre XXXV).

Le sentier devient humide par endroit avec passages en équilibre sur des pierres plus ou moins stables ; une cascade tombe côté gauche. Le sentier vers le chaos du Chéran devient exercice d’équilibre car parfois boueux, parfois rocheux, endroit de plus en plus sauvage et de moins en moins facilement accessible. Cent mètres au-dessus de nos têtes, le fameux pont de l’Abîme  : tout à l’heure nous serons dessus.

Continuer la lecture de « Le chaos du Chéran »



Genillé boucle Auguste Babault

Voilà une petite commune active qui réserve plein de surprises : une piscine en plein air, une piste de pumptrack, deux balades nature au cœur du village, des panneaux avec informations touristiques, des commerces : une boulangerie, une pharmacie et un petit centre commercial.

Aujourd’hui je découvre la boucle Auguste Babault ; en partant de l’église au centre du village, on rejoint rapidement les champs qui ont tendance à regorger d’eau après la pluie ou la neige. Nous passons devant le lavoir en bois de la Varenne, un des trois du village, situé près du ruisseau de Marolles, ruisseau d’une couleur peu engageante aujourd’hui. Il daterait de la fin du XIXe et pourtant je ne le trouve pas sur la carte IGN de 1950.

Il fait froid et surtout humide ; les champs sont gorgés d’eau qui déborde sur les chemins. J’aurais dû mettre des bottes que je n’ai pas emmenées. Nous passons près du circuit de pumptrack – vidéo du test de la piste.

La pumptrack est une piste en enrobé composée de séries de bosses et de virages pour les VTT, BMX, skateboard, trottinettes, draisiennes, rollers.

Puis dans un arboretum où il est prévu une table de pique-nique. Derrière le grillage du moulin du Pont, les chèvres viennent quémander mais la petite chienne Willow n’est pas trop d’accord.

Nous atteignons l’avenue du 8 mai aux larges trottoirs. Vers la droite, un autre circuit balisé bleu De l’Indrois au château du Pont (ce sera pour ma prochaine visite). Nous bouclons vers la gauche, longeons le ruisseau de Marolles ; le square Anthime Venier, fait honneur à cet autre maire de Genillé comme Babault.

Nous passons devant la fuie du château (colombier) en travaux et qui autrefois accueillait 500 nids, ce qui témoigne de la puissance de la seigneurie de Genillé ; l’ancien château d’Adam Fumée (fin XVIe), plusieurs fois agrandi, est un curieux mélange de couleurs : une échauguette blanche, une cheminée en brique, une toiture d’ardoise noire, des façades enduites de brun ou de gris. Plusieurs propriétaires se sont succèdés dont Anthime Venier, maire. Les douves ont été comblées et le pont-levis supprimé au début du XIXe. Château de Genillé sur wikipedia

La place de l’église termine notre boucle : c’est là que la municipalité a installé deux pompes en 1840 pour donner de l’eau potable aux habitants qui ne l’auront au robinet qu’en 1950.

En 2014, cette paroisse dispose d’un lieu de culte à Genillé, l’église Sainte-Eulalie, où des offices sont célébrés en alternance avec les autres églises paroissiales.

L’église a été maintes fois modifiée depuis sa construction du XIIe, la dernière fois pour transformer la chapelle seigneuriale en sacristie ; le plafond de la nef est recouvert de lambris peints ; le bénitier du XIVe est en marbre blanc ; les superbes vitraux sont des ateliers Lobin.

Une petite boucle nature, instructive grâce aux panneaux d’information, agréable, dans un village qui vit au rythme de son temps .

Image de l’itinéraire 2km300, 11m dénivelée, moins d’une heure



Découverte de la forêt de Loches

L‘ancienne forêt royale de Loches, du département d’Indre-et-Loire, est située sur huit communes dont celle de Génillé où je vais passer quelques jours. La première chose qui me surprend, ce sont des pyramides, classées monuments historiques élevées afin de servir de points de rassemblement pour la chasse à courre, toujours pratiquée ici.
Selon Mémoire des Equipages, au xviiie il n’y avait qu’un équipage de chasse à courre en Indre et Loire, au xixe, 26.

Equipage de Montpoupon (memoiredesequipages.fr)

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Les quatre pyramides

Sur la première carte de la forêt de Loches, établie vers 1650, seuls deux carrefours sont repérés par une croix : la croix neuve et la croix de l’Image ; pas encore de route royale (Georges d’Amboise, 1769), pas de nom aux chemins qui n’ont pas la rectitude  d’aujourd’hui. La forêt est partagée en cinq parties, les gardes (de bataille, de Mignon, de Poussechat, de  Mareschal, de Migeon), auxquelles est affecté du personnel pour la gestion et la surveillance des forêts : on  retrouve aux carrefours les noms de ces nouveaux métiers des Eaux et Forêts : grand maître (le plus haut grade, créé en 1689), conservateur, inspecteur, garde, garde général.
Les quatre pyramides ont été construites dans les années 1770, juste après la route royale ; d’autres forêts à la même époque en ont construit : Châteauneuf-en-Thymerais (Eure-et-Loire), Sénart (91) à la demande du roi pour servir de point de ralliement des équipages de chasse à courre. La première ordonnance sur les Eaux et Forêts date de Colbert en 1669. Elle oblige à construire un grand chemin royal d’au moins 72 pieds de largeur pour les coches, carrosses, messagers et rouliers.

Article VI. ORDONNONS que dans les angles, ou coins des places croisées triviaires & biviaires qui se rencontrent és grandes routes & chemins royaux des forests, nos Officiers des Maistrises feront incessamment planter des croix, poteaux ou pyramides à nos frais, […] avec inscriptions & marques apparentes du lieu où chacun conduit, […] 

Les pyramides de la forêt de Loches, toutes légèrement différentes, suivent-elles à ces préconisations du XVIIe ?

  1. La pyramide de Saint-Quentin mène à Saint-Quentin sur Indrois par la D31  et Loches ;
  2. La pyramide de  Genillé mène à Genillé par la D764 ; elle est surmontée d’une sphère portant une girouette. Au carrefour, la maison forestière de Beauchêne.
  3. La pyramide des Chartreux mène à la chartreuse de Liget par la D760 ; la seule dont la base est pentagonale car cinq grandes voies se rejoignent au carrefour. Maison forestière de la Plotterie. En 2015, le département aménage le carrefour avec du béton désactivé ; en 2018, l’architecte des bâtiments de France fait enlever la bordure. Capital, 27/08/2019
  4. La pyramide de Montaigu mène au hameau de Montaigu à Genillé, maison forte et ancien fief ; elle ne figure pas sur la carte d’état-major de 1866 : peut-être parce qu’elle se trouve exactement au point d’intersection de quatre sections de la carte. Pyramide élancée terminée par une sphère. Longtemps entretenue par les forestiers, cette pyramide était autrefois entourée de rosiers sauvages. La maison forestière a été rasée à la fin des années 1970.

Continuer la lecture de « Découverte de la forêt de Loches »