(photo mise en avant : tuiles vernissées du palais ducal à Uzès et intérieur de la canalisation de l’aqueduc du Pont du Gard)
7 h : le car est plein d’une trentaine de personnes prêtes à découvrir la ville d’Uzès (non il n’y a pas que les bonbons Haribo !) puis le pont du Gard.
J’ai visité l’aqueduc romain en 1976, tout était gratuit, on pouvait circuler à ses risques et périls, au-dessus du canal du 3e étage ; de 2006 à 2008, je découvre les ponts de Sartanette, Roupt, Roussière, les tunnels de Sernhac, des vues inédites sur le pont du Gard, grâce au jeu de geocaching ; puis en juin 2018 grâce à l’association Les Amis de Jouques et Pont du Gard et Patrimoine, les sources de l’Eure, puis une balade le long de vestiges de l’aqueduc que j’avais visités précédemment.
Vers 40-50, pour capter de nouvelles eaux, ils jetèrent leur dévolu sur le site de la Fontaine d’Eure, Fontes Urae. Des sources surgissant aux portes d’Uzès [N.-E) , à 20 kilomètres à vol d’oiseau de Nîmes. De la source à la ville, l’eau s’écoule dans l’aqueduc par gravité, avec une pente extrêmement faible : 24,8 centimètres par kilomètre… Par exemple, pente de 0.07m du Pont du Gard à Saint-Bonnet. Sans outil précis pour évaluer l’altitude, la gestion de la pente est une prouesse pour l’époque.
Dernière visite en septembre 2023 avec l’association acantari que je remercie pour l’invitation ; le site du Pont du Gard est un lieu réglementé depuis 2004, devenu un Grand Site de France, avec un vaste et luxueux musée et un parking payant.Uzès : une guide conférencière effectue une visite de deux heures de la petite ville, moins de 10 000 habitants. Elle fait tout pour la rendre attractive, en souligne les points historiques remarquables – comme le fait qu’il fut le premier duché de France1 -, l’exil des protestants après la révocation de l’Edit de Nantes, les curiosités :
- la tour clocher Fenestrelle de 40m de haut,
- l’Hôtel de Gabriel Joseph de Froment, au péristyle à colonnes et aux initiales CR (Castille et ROHAN-GUÉMENÉ),
- la nouvelle façade de l’église plaquée sur l’ancienne façade du xviie siècle en 1873 ;
- la place aux Herbes qui me fait penser à la place du marché à Aix-en-Provence.
12h30 : Sous la chaleur intense, à l’heure la plus chaude du jour, ce sont donc presque 500m qu’il faut parcourir à pied en traversant le Gardon sur l’ancienne voie routière qui longe le pont. Pas le temps de décoder la plaque commémorant la restauration du pont en 1855 par les premiers architectes du patrimoine.
CET AQUEDUC CONSTRUIT PAR LES ROMAINS POUR CONDUIRE À NIMES LES EAUX DE LA FONTAINE D’EURE
REPARE PAR LES ÉTATS DE LANGUEDOC EN MDCCII [1 702] A ÉTÉ CONSOLIDÉ ET RESTAURÉ EN MDCCCLV [1855] PAR LES ORDRES DE L’EMPEREUR NAPOLÉON III ET PAR LES SOINS DU MINISTRE D’ÉTAT CH. QUESTEL ET J.CH. LAISNÉ ARCHITECTES.
Le Pont du Gard est situé sur les communes de Remoulins et Vers qui, depuis quelques années, porte le nom de Vers-Pont-du-Gard (bien vu pour le tourisme !). Construit vers 50 après JC, sous les règnes de Claude ou de Néron, l’aqueduc a alimenté pendant 5 siècles la ville de Nîmes mais selon l’archéologue Jean-Luc Fiches, de manière optimale pendant près de deux cents ans. J.-L. Paillet évalue la durée de construction à 500 ouvriers, durant 5 ans en fonction des engins de levage.
Trois niveaux, 50 mètres de hauteur [le plus haut du monde], 6 arches au premier étage, 11 au deuxième et 35 au troisième. En longueur il ne mesure plus que 275 m au lieu de 360 m à l’origine. Les 11 millions de pierres nécessaires, extraites d’une carrière2 de calcaire tendre située à 500 mètres en aval, sont maintenues non par du mortier, mais par des tenons de chêne. Aujourd’hui encore, le pont garde les marques des échafaudages utilisés durant la construction.
13h30 : beaucoup de monde à table, un plat chaud (effilochée de boeuf) que j’aurais bien troquée contre une salade, et un riz au lait que j’aurais bien échangé contre un sorbet glacé ; c’était bon et, dans une ambiance décontractée, le prochain voyage de groupe s’organise… Manosque ?
15 h : gare au stress thermique quand on repart aussitôt pour un effort intense, en période de canicule, après un repas arrosé : il faut gravir les 80 marches jusqu’au troisième étage du Pont où se trouve la canalisation. La montée d’escaliers intégrée dans le pilier terminal en 1844 ne permet pas les croisements. Un guide nous accompagne, truffant son discours d’anecdotes dont je n’arrive pas toujours à détecter la véracité…
A l’endroit où la canalisation a perdu ses dalles de couverture, nous avons la vue sur le Gardon. On la traverse sans toucher le plafond ; les concrétions calcaires agglutinées sur les parois en diminuent la largeur. L’épaisseur moyenne des concrétions serait de l’ordre de 1 m (0,5 m sur chaque paroi).
Actuellement beaucoup d’entre elles [les concrétions] ont disparu. Elles ont été récupérées, utilisées voire réutilisées par les habitants de la région, par les moines bâtisseurs pour la construction des chapelles. Très solide, homogènes et parfaitement plane sur une face, elles constituent un matériau de choix pour les maçons. Comité Intercommunal de Défense du Site du Pont du Gard
On marche sur le béton qui protège le radier d’origine ; pas d’enduit rouge imperméable et solide dans le fond contrairement à celui de Traconnade. Sur la partie supérieure, à l’extérieur, les signes compagnoniques ont été gravés dans la pierre mais il faudrait monter sur la couverture de l’aqueduc pour les voir, ce qui est interdit…
Les crues : le niveau d’eau durant plusieurs crues en 1910, 1958, 2002 atteint 28 à 30 m de haut : les arches, d’une ouverture inhabituelle, maintiennent le tablier hors d’eau.
Le pont routier : Il fut construit par Henri Pitot entre 1743 et 1747. […]. En fait depuis le début du treizième siècle des échancrures furent pratiquées sur les piliers des arches du deuxième étage afin de laisser le passage à un mulet bâté. Cette situation ne pouvant pas durer, les Etats du Languedoc envisagèrent de grands travaux : la restauration du pont aqueduc et la construction d’un pont routier attenant au Pont du Gard. Le passage des convois importants perturbant le pont, les voitures et poids lourds n’ont plus le droit d’emprunter le pont routier.
16 h : au frais dans le musée ; 12 mn de survol au dessus du Pont. Le musée a reconstitué une carrière de pierre, affiché plein de panneaux explicatifs. Le symbole phallique me rappelle un autre pont romain, celui de Ganagobie, sur la voie domitienne ou le pont Flavien à Saint-Chamas. Il s’agit donc bien d’un symbole romain protecteur.
… un phallus gravé dans un bloc d’angle de la culée nord, symbole de robustesse face aux crues et signe destiné à éloigner le mal, protéger les voyageurs dans ce passage difficile. Le pont romain de Ganagobie
17 h : Une journée bien remplie ; n’ayant pas pris de note, j’ai sélectionné les informations susceptibles d’intéresser un maximum de personnes ; celles présentes ce jour là peuvent toujours me proposer des ajouts ou modifications.
Pour les amateurs de randonnées Le sentier de l’aqueduc, Les tunnels de Sernhac, Sernahc l’aqueduc de Nimes et les Romains dans ce blog.
1 duché : plusieurs duchés ont existé en France mais il semble que pour Uzès, c’est la première fois qu’un duc en titre soit le bénéficiaire
2 carrière de Vers : les pierres de cette carrière ont servi à la restauration du Prieuré de Sainte-Victoire
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Bravo Nicole !
Avec tous mes vœux pour plein de belles choses en 2024 !
Bises
Jean-Claude