Le circuit du genièvre

Pourquoi ce nom de ‘circuit du genièvre’ ? peut-être parce qu’il passe devant la distillerie Claeyssens  (1 rue de la distillerie) qui, depuis 1817, fabrique un alcool de genièvre reconnu. Toujours en activité, les méthodes n’ont pas changé depuis. Classé au titre des monuments historiques, le bâtiment se visite. Durant mon enfance, le genièvre fabriqué ici était tellement connu que mon père proposait aux invités un « Wambrechies » et non un genièvre. A cette production, s’ajoute la bière au genièvre.
N’ayant pas de véhicule quand je suis dans le nord, j’ai choisi une randonnée accessible avec les transports en commun : Wambrechies est accessible avec un seul bus et 45mn de transport.

La météo ce jour à cet endroit :
Avec le vent et la température ressentie

Le bus m’arrête place de la mairie. L’église saint-Vaast d’un côté de la place, l’hôtel de ville et son beffroi de l’autre, tous deux construits par le vicomte Obert de Quévy, en 1859.
L’architecte Charles Maillard conçoit l’hôtel de ville dans le style « Renaissance flamande ». Sa façade en « pas de moineau » (pignon à gradins) ornée de briques de couleur est surmontée d’un fronton,  décoré des armes du vicomte et…  de Napoléon III. Éclairée par des lustres du style Directoire, la salle des mariages est meublée de tables et de sièges d’époque, ornée d’une grande cheminée, elle-même surmontée d’une grande glace et des armes du vicomte.

L’accès des pièces à l’étage se fait par une tour circulaire surmontée d’un beffroi qui culmine à 27 m et en haut duquel trône une rose des vents. Dans celui-ci, on pouvait distinguer un pigeonnier et un chemin de ronde pour observer les environs, détecter les incendies et faire sonner le tocsin à l’aide d’une cloche qui, comme celles de l’église, sera démontée et fondue lors de la Première Guerre Mondiale. Selon le site de la commune

L’église Saint-Vaast – qu’est-ce qu’elle est imposante pour une commune de 10 000 habitants ! – de style néogothique, est longue de 55 mètres, large de 22 mètres. L’architecture de l’église est confiée à Charles Leroy (architecte de Notre Dame de la Treille à Lille), qui décide de faire une tour, surmontée d’une flèche qui culmine à 72 mètres.  Pendant la Seconde Guerre mondiale, la flèche a disparu :  le clocher était dans l’axe des pistes  de l’aérodrome de Bondues et empêchait les décollages en escadrille de l’armée occupante qui démonta 44 des 48 points d’ancrage.

Direction le Chateau Robersart, une résidence secondaire un peu comme les bastides en Provence, construite à l’écart des villes. Ici, à l’écart de Lille où travaillent les propriétaires.

Sa devise Pro lumine virtus (au nom de la puissance de la lumière). Avant le château de 1760, deux autres se sont écroulés. Construit dans un style Renaissance, il met en valeur des matériaux locaux en alternance : la brique rouge et la pierre blanche de Lezennes.  En 1810 le vicomte Martel Obert de Quévy époux d’Alexandrine Robert de Robersart, en fait l’acquisition. Juliette, Comtesse de Robersart, fut la dernière habitante qui a laissé son nom au bâtiment.

Un pont à deux arches sur le ruisseau mène au musée de la poupée et du jouet ancien, ainsi qu’à la bibliothèque ; la balade est bien agréable dans les jardins : un kiosque, des espaces bien entretenus ou bien des zones favorisant la biodiversité ; certains plans d’eau sont empoissonnés, d’où les rubans rouges et blancs qui ont pour but de faire fuir les oiseaux prédateurs ; oies et canards vivent en bordure d’autres plans d’eau ; plusieurs portails métalliques s’ouvrent sur l’extérieur avec un rappel sur le ‘port du masque obligatoire’. Je sors à l’extrémité du parc pour rejoindre le chemin de halage le long du canal de la Deûle.

Il mène au port où se côtoient les péniches et les bateaux de plaisance. Je traverse le pont et descend sur le chemin de halage de l’autre côté en contournant le terrain de sport et le jardin public du vent de Bise.

La voie du tram longe le canal : un tramway touristique de 1906, avec ses banquettes en bois, relie à la belle saison, Wambrechies à Marquette, en longeant la Deûle. Association Amitram

La voie se dirige ensuite vers la ferme Saint-Chrysole, auparavant dénommée « Ghestem ». Ferme typique de plan carré, aux murs rouges barres, tuiles mécaniques et passage couvert menant à la cour intérieure. Entièrement rénovée, elle est dédiée à l’événementiel avec salles de restaurant et de réceptions.

En face, l’arrêt du tram avec un quai central à deux voies que je traverse ; de l’autre côté de la départementale, l’oratoire de briques N.D. de Lourdes ; à gauche, au lieu-dit le Colombier, je suppose que la bâtiment carré est un ancien colombier aménagé en habitation. Dans le Nord, le privilège du droit de colombier est attribué aux autorités civiles et religieuses qui avaient la responsabilité des messageries.

A gauche le chemin de Forte-court1, route étroite macadamisée mais campagnarde, qui passe devant une ferme à l’entrée pavée, dont la toiture de tuiles flamandes semble en bien mauvais état. Je traverse la modeste becque2 Dewasier jusqu’au carrefour avec le chemin des Trois Tilleuls ; un petit détour à gauche sur 50 m mène à la brasserie Catry.

Construite en 1883, fermée en 1939 ; après l’Occupation, toute la brasserie avait été réquisitionnée par les Allemands et la famille Catry expulsée ; la brasserie présente un pignon flamand surmonté d’un christ sauveur. Des briques jaunes clair sont assemblées pour former l’année de construction de l’ensemble brassicole. Dix personnes travaillaient ici ; chaque jour, en charrettes à chevaux d’abord, en camion ensuite, on livrait les 40 bistrots aux armes de la brasserie Catry à Wambrechies, Quesnoy, Deûlémont et Verlinghem. La Voix du Nord, 01/09/2014, J.P. Catry brasse des souvenirs

De style flamand avec sa façade en « pas de moineau », elle présente au sommet une statue du Sacré Cœur qui lui conféra son nom de « brasserie du Sacré Cœur. » C’est une propriété privée où vit encore un descendant de la famille Catry.

Le décor est cinématographique. Ici, rien n’a bougé et nous avons l’impression de faire irruption au début du siècle dernier. Les cuves en cuivre sont intactes, la cheminée est encore présente et reliée à la magnifique chaufferie recouverte en partie de carreaux de ciment mettant en valeur ses mécaniques. Portraits de territoire (avec photos)

Sur la gauche, dans une zone où se trouve un blockhaus, une vaste dalle de béton, bordée au fond par un mur : les vestiges d’une installation militaire ? Plus loin une maison avec un oratoire sur sa façade puis le blockhaus dans le jardin de la propriété.

Dans le chemin du Château des Bois, une sapinière, une ferme avec façade en « pas de moineau » portant un petit oratoire protecteur. Un groupe de chasseurs traverse la route sur laquelle je circule ; deux minutes plus tard, des coups de fusils retentissent et résonnent. Notre Dame des moissons, protégez-moi !

De vrais chemins de terre pendant un court passage : chemin de la Balle puis chemin des poux volants qui rejoint la route de Linselles.

Ce chemin est situé dans les zones alluvionnaires de la Deûle, de la becque Dewazier et de la descente d’eau des collines de Linselles. C’était un endroit très humide avec des nuées de pucerons qui traversaient cette voie « les poux volants ».

Télécharger le circuit du genièvre, ville de Wambrechies

Je continue sur la route, coupe le chemin des Bœufs puis la route D654 ; l’impasse contourne les immeubles, laissant à gauche le fort de la Redoute occupé par l’association Emmaüs.

Le fort de la Redoute suivra, édifié entre 1891 et 1894. Si le [fort du] Vert-Galant a été édifié à moins de 20 m d’altitude, car proche du confluent Deule-Lys, [le fort de] la Redoute culmine par contre à plus de 30 m. Ces ouvrages abritaient alors cuisines, dortoirs, sanitaires, lieux de cultes, d’où la chapelle encore visible au fort de la Redoute.

Le chemin du fort longe le cimetière et se prolonge par la rue des piqûrières jusqu’au canal. Ce nom est lié à la présence d’une ancienne filature de lin et ses ouvrières – autrefois seules les femmes exerçaient ce métier de piqûrière – capables de réparer les tissus. Je sors sur le chemin de halage par une porte en briques qui était peut-être l’entrée officielle de l’usine.

Construite en 1923 pour la Société Anonyme des Établissements Louis Nicolle, cette filature est l’œuvre d’André Granet (1902-1971), architecte qui venait de réaliser pendant la guerre les usines Gnome et Rhône de Gennevilliers, et qui conçut une vaste structure en béton armé, généreusement éclairée par de vastes baies rectangulaires, distribuée en deux ailes de 37 mètres de part et d’autre d’une haute tour de brique. Le style aérien de cet édifice industriel […] est inhabituelle dans le monde du textile. Monumentum

La boucle est bientôt bouclée. D’un seul regard, j’embrasse l’église, le beffroi, les quais, le pavillon de la capitainerie, le château de Robersart.

Une randonnée fort agréable, bien conçue, variée, avec de nombreux centres d’intérêt qui m’ont permis de redécouvrir mon Nord natal. Évidemment, beaucoup de routes mais généralement fréquentée uniquement par les riverains. Les wambrecitains peuvent être fiers de leur patrimoine.

Image de l’itinéraire 10.800 km (ne comprend pas le passage par la distillerie), 6m (+31, -31), 2h35 environ

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1court : domaine rural dans le nord
2becque :  cours d’eau, ruisseau en Flandres

©copyright randomania.fr


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